Je rentre en formation dejeps et je suis étonné de voir des articles mentionnant l’inutilité de certaines manoeuvres de SIV. J’aimerais exprimer mon désaccord et tenter de partager mon point de vue d’humble crosseur et voltigeur en herbe. « C’est avec l’expérience que l’on prend les bonnes décisions. Malheureusement, l’expérience se construit souvent sur de mauvaises décisions ». Tout commence là : les stages SIV et surtout l’entraînement régulier à réagir aux incidents de vol permettent d’acquérir une certaine expérience, dans un contexte sécurisé. Indispensable à tout pilote s’engageant dans la pratique du cross, elle peut également être utile aux pilotes qui volent en local, même en conditions plutôt calmes.
Pour rebondir sur ce que j’ai lu, je ne pense pas que de travailler les sorties d’autorotation, de décrochage et de vrille soit inutile. J’ai vécu des situations où maîtriser ces manœuvres, ou pas, à fait la différence. Je vole en cross et en compétition dans les Alpes du sud où les conditions thermiques sont plutôt toniques, les brises de vallée fortes et turbulentes… J’y ai été témoin d’une autorotation involontaire suite à une cravate, d’un départ de vrille suivi d’une cascade d’incidents (attaque oblique, fermeture, décrochage…) et ce avec des voiles EN C et EN B.
Un autre accident dont j’ai été témoin : voile EN A, conditions laminaires et douces de bord de mer… une erreur de placement dans son approche contraint la pilote à passer entre deux obstacles dans un espace très restreint. La demi aile droite touche un palmier et ferme. La réaction de la pilote est de freiner symétriquement, ce qui la conduit au décrochage à 3 mètres/sol. En discutant de l’accident plus tard, elle me dira qu’en sentant sa commande se ramollir (suite à la fermeture) elle a baissé les mains pour retrouver le contact… alors que dans ce cas, il aurait plutôt fallu rester bras hauts et contrôler le cap à la sellette. Je pense qu’un entraînement en SIV lui aurait peut être permis de reconnaître cette sensation et d’avoir une réaction plus appropriée.
Je prends pas mal de marges dans ma pratique. Je renonce souvent à voler quand d’autres y vont. Tout simplement parce que je garde à l’esprit que le parapente est un loisir et que se mettre en danger, se faire peur, ou tout simplement ne pas prendre plaisir est idiot… Et pourtant, il m’est arrivé de me retrouver en l’air dans des conditions trop fortes. J’ai le souvenir d’une frontale massive à 100m/sol, et je suis heureux d’avoir su quoi faire sans avoir eu besoin d’y réfléchir. L’erreur est humaine et tôt ou tard, on finit par faire un mauvais choix. Décoller quand c’est trop fort, se placer dans une zone turbulente, passer sous le vent d’un relief, traverser un cisaillement… Il est alors préférable de savoir gérer la suite ! Donc je ne pense pas que de s’entraîner en SIV soit inutile. Pas indispensable si on se contente de vols en conditions calmes et connues, mais utile quand même. Vivre ces situations au-dessus d’un plan d’eau avec un bateau et un gilet, va permettre de progresser sur les plans mental, technique et physiologique.
Côté mental, le pilote va progresser sur son niveau d’anxiéte et de stress, apprendre à connaître les limites de sa voile et voler plus serein. Et il découvrira la centrifugation ce qui lui permettra de reculer ou d’éviter la viscosité mentale due à un stress trop important. Les »poignée contact » et les allusions répétées au secours en stage permettront éventuellement de se souvenir que l’on a un parachute de secours à disposition.
Côté technique, le pilote apprendra à se sortir des incidents de vol avec un minimum de perte de hauteur. Car une autorotation ou un départ de vrille en conditions thermiques, ça peut arriver. Les sensations développées en stage SIV permettent de reconnaître la situation plus vite et d’éviter le surpilotage menant aux cascades d’incidents.
Côté physiologique, le pilote, avec un peu d’entrainement, résistera mieux à la force centrifuge. On a tous eu plus ou moins peur lors de nos premiers 360° engagés. Est-ce une raison pour ne pas explorer ce domaine de vol ? Et puisque l’on parle de 360° engagés, je voudrais rappeler qu’une sortie chandelle est l’intermédiaire entre une sortie longue dissipée sur plusieurs tours (donc avec perte de hauteur importante) et une sortie rapide dissipée en un tour mais techniquement plus exigeante que la simple sortie chandelle sur cap suivie d’une tempo. manuelsignes@yahoo.fr