Retour sur l’injustice subi à la Bailedone’xplore

Voici l’intégralité de la lettre que nous avons reçue de Rémi Bourdelle : annoncée dans notre n°216, concernant la pénalité plus que discutable qui l’a privé d’une victoire méritée à la Bailedone’xplore et l’annulation qui s’en est suivie du Mont Blanc Air Tour.

Lors de la journée n°2 en fin d’après-midi 4 pilotes se retrouvent en tête de course, Philadelphe, Arthur, Léo et moi.Nous posons à l’avant dernière balise.

L’organisation pose une interdiction de vol. Nous avançons à pied sur la départementale en groupe.

Arrivés dans la ville d’Allevard nous devons monter environ 1500m sur une crête pour se rapprocher de la dernière balise. Avec les efforts de la veille et la journée de chacun, des différences physiques se font naturellement. Arthur et Philadelphe se retrouvent en arrière. En une heure Léo et moi créons une avance de 450m D+ et 3km sur les deux autres copains.

Nous savons que cet écart ne fait qu’augmenter et que sans possibilité de vol thermique le résultat final se dessine fortement.

Dans une situation plutôt confortable, 2 choix s’offrent à nous :

– Continuer sur la crête en aller-retour puis décoller 10min avant la fin de course pour rejoindre nos assistants en vallée

– Décoller sur un des sommets de la crête, faire la balise en vol et commencer à revenir vers le goal sur un glide pour retrouver nos assistants et optimiser les dernières minutes de la journée à pied.

Arrivés sur un sommet, nous trouvons un décollage 5 étoiles, nous choisissons donc la deuxième option. On se prépare et on se met en vol en direction de la balise située à 5km (aller).

En sortie de décollage, j’aperçois un rideau de pluie dans la balise, je réfléchis aux options qui se posent à moi. Avec de la forêt à mes altitudes je ne peux pas reposer en montagne, je n’ai que le choix d’aller poser en vallée. A 3km de la balise sur plus d’un quart de tour, je décide de revenir sur mes pas. J’entame une descente en vallée, la pluie commence doucement à déborder sur moi, je choisi de garder l’accélérateur à bloc et de faire des wings avec quelques tours de 360°. Au final, je m’empute de 750m vertical avant de faire une finale dans un champ que je juge le plus sécuritaire, en long sans obstacle, je pose à l’accélérateur.

A ce moment je sais que l’avance sur Arthur et Philadelphe est considérablement réduite. Je fais l’effort au sol pour aller à la balise et avancer au plus loin vers le goal.

Jusque-là aucun souci.

A 23h53 les choses se compliquent…. Je reçois un message de « l’organisation » mentionnant une pénalité de 3h pour avoir consciemment voler sous la pluie.

Dans une incompréhension totale, je me presse d’appeler « l’organisation ». J’explique que je ne comprends pas ce qu’il se passe, je tente de donner ma version des faits qui jusque-làn’a pas été consultée. 

La réponse auquel j’ai droit est :  « dans tous les cas je ne reviendrai pas sur ma décision » « c’est comme au rugby, lorsqu’on applique une pénalité les joueurs ne discutent pas » « On voit bien que dans ton vol tu cherches à te rapprocher de la balise en te laissant dériver avec un faible taux de chute, si tu voulais montrer que tu voulais descendre tu aurais dû faire les oreilles… » je tente d’expliquer que je cherche juste àposer en sécurité sans chercher a gagné quoique ce soit sportivement et que je ne réalise pas les oreilles lorsque la voile commence à se prendre des gouttes. Apparemmentd’après l’organisateur, dans certains contextes, il faut bel et bien réaliser les oreilles, même sous la pluie…

A ce moment je me dis que le décalage de conversation est très grand et que je discute avec un mur.

L’organisateur est pressé d’aller dormir pour gérer la suite de la course le lendemain, je n’ai pas la possibilité d’avoir une présomption d’innocence sur la pénalité qui m’est attribuée. 

Dépité, je reprends donc la course le lendemain avec cette pénalité. Arrivé au goal je tente d’aller voir l’organisateur pour discuter avec lui. Toujours aussi fermé à l’analyse demes arguments de défense, il est catégorique sur le fait de ne pas revenir sur sa décision.

Pour les curieux, l’historique de la trace est disponible ici :https://lt.flymaster.net/?pev=1&grp=6161&d=776971212# le 16.08.24 / 22h19-22h30

Arguments de défense : 

– Quel est l’intérêt de décoller et voler consciemment sous la pluie alors que l’avance sur nos concurrents est plus que considérable ?

– Quel est l’intérêt de décoller et voler consciemment sous la pluie alors que l’option de faire l’aller-retour sur la crête est tout à fait possible et similaire ?

– Quel est l’intérêt sportif de décoller et voler sous la pluie sachant qu’il y a 8km A/R à réaliser soi-disant sous la pluie ?

– Je ne tire aucun avantage sportif et l’analyse de la trace montre objectivement que j’agis de façon le plus sécuritaire possible, une trace ne ment pas.

– En admettant que je décolle sous la pluie, pourquoi sur les 3 premiers km ma vitesse est équivalente bras haut avec un taux de chute porteur et qu’au moment où je choisi d’aller poser mes vitesses de vol augmententconsidérablement avec des taux de chute plus importants ?  Une trace ne ment pas.

– Pourquoi se baser uniquement sur un critère pas totalement objectif (un radar) où l’on sait qu’il y a un degré d’imprécision sur la zone précipitée pour affirmer un décollage et vol sous la pluie ?

– Prise en compte des historiques de conversation « Zello » expliquant nos options possibles sans jamais mentionner l’inquiétude de pluie

– Des photos des assistants en bas dans la vallée.

– Après l’analyse de personnes compétentes (membres et entraineur du pôle France) sa conclusion est claire, « Il n’y a aucun avantage sportif et la trace montre que le pilote cherche à poser en sécurité. Au vu des vitesses de vol en sortie de décollage, il n’y a pas très certainement pas de pluie. » Une trace ne ment pas.

Entre la fin de course et la remise des prix, j’ai le loisir de parler aux pilotes concernés ainsi qu’a un responsable du championnat de France de marche et vol. Je reçois de la compassion, de l’empathie de la part de ces derniers sur cette injustice.

Mes interrogations :

– Dans toutes les compétitions de distances et dans toutes les autres compétitions de marche et vol du championnat de France le règlement mentionne la composition d’un comité de pilote. Culturellement composé du DE, d’un pilote choisi par le DE et d’un pilote choisit parmi les pilotes. Le comité a pour but de statuer en cas de litige sous forme démocratique. Dans cette compétition il n’y a pas de comité de pilote, seul le DE est décisionnaire (dictature ?) Est-ce normal ?

– Pourquoi avoir redonner l’autorisation de vol aux pilotes si l’organisateur savait pertinemment que le secteur de la balise était sous la pluie ?

– Dans le règlement de la course est mentionné « Tout comportement jugé dangereux ou non-respect des règles de vol (espaces aériens, VFR, etc..) par un compétiteur entraînera l’exclusion du pilote de la compétition. »Durant la course un pilote, malgré lui se fait aspirer dans le nuage sur plus de 1300m, il n’en tire aucun avantage sportif après avoir réalisé des 360°. A ma connaissance,malgré cette mésaventure, il me semble que le pilote se met en « danger » en volant plus de 1300m dans un nuage, une trace ne ment pas, la subjectivité n’a pas lieu d’être ici. Après avoir fait remarquer au DE ce souci, ce dernier préfère de pas agir, sous prétexte que le pilote a bien réagit une fois dans le nuage… La subjectivité dictatoriale a donc visiblement le dernier mot.

– En admettant que je me suis mis en danger en décollant et volant consciemment sous la pluie, pourquoi ne pas appliquer le règlement écrit pour en faire un exemple ?

– A 13km d’une fin de course pourquoi appliquer une pénalité à 23h30 sans questionnement du pilote concerné ? Ne serait-ce pas mieux de laisser terminer la course le plus sportivement possible puis discuter et appliquer des pénalités potentielles ?

– Revenir sur une décision est-elle signe de faiblesse ? est-ce mal vu ? exemple du Mt Blanc Air Tour avec une mise à jour du podium après coup suite à une analyse objective d’une trace et l’application d’une pénalité post course.Cette décision admet certes une erreur mais permet selon moi de gagner en notoriété et en sérieux aux yeux de tous.

– Lors de la deuxième journée, le DE envoie un message généralisé concernant l’interdiction de continuer les vols, « le glide devenant obligatoire sans possibilité d’enrouler. » En discutant avec le DE, ce dernier affirme que la tête de course (dont je fais partie) se situe dans un secteur qui n’était pas sous la pluie et qu’il a laissé la tolérance de finir d’enrouler le thermique. Quelle est la logique, l’équité sportive à laisser une tolérance, de la subjectivité suite à l’annonce d’un règlement… ? Après avoir insisté auprès du DE pour analyser des traces qui encore une fois ne mentent pas, il s’est rendu compte que dans les secondes où il a envoyé le message, les 4 pilotes ont arrêté d’enrouler pour finir leur vol sur un glide… En sachant lire et analyser une trace on y trouve très souvent les réponses à des questionnements. Une trace ne ment pas.

– Analyser une trace n’est pas inné et demande de l’expérience mais n’est-ce pas un indispensable pour endosser le rôle de directeur d’épreuve ?

– Il y a soi-disant une volonté collective de faire évoluer la discipline du marche et vol, est-ce utopique ? Sommes-nous dans un milieu malsain ? Cette question me laisse perplexe lorsque dans mon cas d’injustice, je vois les pilotes directement concernés me soutenir par écrit et oralement mais restant muet devant l’organisation pour en tirer un intérêt purement individuel ? Je fais le triste constat qu’un intérêt individuel prime sur un intérêtcollectif, comment faire évoluer la pratique avec cet état d’esprit ?

– Lorsque je parle de ce problème aux responsables de marche et vol de la fédération, est-ce normal d’avoir unevision centrée uniquement sur l’avenir sans chercher àrésoudre un problème présent ? (Cas de figure similaire lors de la Fly Chablais Challenge)

– Est-ce normal sur le plus haut niveau de représentation du marche et vol français d’avoir des directeurs d’épreuves sans qualifications et sans expériences à ce rôle a haute responsabilité ? Ne faudrait-il pas justifier d’un pré requis minimum ou bien s’entourer de personnes ayant des compétences minimums ?

Certains diront que ce n’est qu’une compétition sans enjeux, qu’il faut passer à autre chose.

Je répondrai à ces personnes qu’il ne se rendent pas compte de l’investissement mis en jeu, qu’il soit financier, en temps d’entrainement sur le terrain au sol, en vol, sur les concessions familiales, professionnelles. Les résultats sportifs ont des impacts sur les attentes des sponsors, sur les sélections de certaines compétitions…

En conclusion, je fais le triste constat que je subi une décision subjective purement arbitraire, ce qui me blesse profondément. Quelle réputation vais-je avoir ? Une personne qui ne respecte pas les règles, qui se met volontairement en danger ?

Actuellement je me remets en question sur la qualité et la quantité d’investissement que je souhaite investir dans cette pratique.

Le choix de l’annulation du Mont-Blanc Air Tour a été très rude, peut-être trop a chaud sur un « coup de tête » ? J’admets que c’est surement une erreur d’avoir fait ça, et je m’en excuse pour les personnes concernées avec les divers enjeux qui peuvent en découler. J’avais et j’ai encore ce gout amer d’injustice non résolue à ce jour qui me réfute dans l’idée de donnée de mon temps de libre dans de l’associatif.  S’occuper de soi en premier n’est pas égoïste, c’est un acte d’amour et de bienveillance envers soi-même.

L’annulation de la compétition m’a demandé une charge de travail à nouveau conséquente (rappel des refuges, des partenaires, gestion des remboursements…). 

Cette décision a été prise suite à l’analyse de plusieurs facteurs :

– L’organisation de ce type d’évènement représente 400h d’organisation associative où ma récompense personnelle est de retrouver des étoiles dans les yeux des pilotes et de faire progresser cette jeune pratique du vol libre. Analysant la mentalité de certains pilotes se contentant de consommation des compétitions avec un intérêt individuel omniprésent, je pense avoir perdu la motivation à donner de mon temps de libre bénévolement.

– La mise en œuvre de la compétition nécessite d’être totalement investit d’un point de vue sécuritaire et sportif. A ce jour, toujours blessé et incompris, je ne me senspersonnellement pas prêt à m’investir dans cette lourde tâche.

– L’annulation de l’événement peut éventuellement faire réagir certains pilotes plus sensibilisés à l’injustice pour tenter de trouver des solutions sur l’avenir.

 

Mes espérances : 

– Que les personnes de la communauté du marche et vol, pilotes, organisateurs, fédération se rendent compte qu’il y a un souci majeur de professionnalisme au niveausécuritaire et sportif au niveau du circuit du championnat de France.

– Personne ne devrait subir une décision arbitraire que ce soit dans le domaine du sport ou autre. Ça ne devrait tout simplement pas exister.

– Que l’intérêt collectif de la communauté du marche et vol passe avant des opportunités individuelles.

Je me doute bien que cette lettre de plainte, cette bouteille à la mer peut énerver plus d’un pilote en pensant que ma décision est totalement personnelle et égoïste. Si c’est le cas, je m’excuse par avance de cette possible conclusion en espérant que ces personnes arriveront à se mettre à ma place et comprendrons mon point de vue.

Je reste bien évidement ouvert et disponible si certains d’entre vous veulent discuter, proposer des choses ou tout simplement me soutenir.