Coup de fil à  Hubert Aupetit



Outre qu’il est l’auteur de la fameuse bible du vol libre  »Les visiteurs du ciel », Hubert, agrégé de mathématiques et de philosophie, a écrit plusieurs livres de médecine sur les maladies. Son avis est celui d’un homme éclairé…

Depuis le début du confinement, Parapente Mag a partagé un court moment téléphonique avec (par ordre alphabétique) : Philippe Briod, Nicolas Cochet, Jean Baptiste Chandelier, Valéry Chapuis, Laurent Chiabault, Dominique Cizeau, Denis Cortella, Bruno Coûteaux, David Dagault, Théo de Blic, Tony de Olivera, Fred Delbos, Gérard Delorme, Valentin Delluc, Kti Devos, Hervé Gabet, Véronique Gensac, Yves Goueslain, Philippe Lami, Vincent Lebeau, Jérome Maupoint, Cédric Nieddu, Sylvain Piroche, Daniel Raybon-Pernoud, Eric Roussel. Vous pouvez retrouver ces échanges sur facebook parapente mag et parapentemag.fr

S’il te plaît, confine-moi un mouton  !
Où es-tu confiné  ?
Si vous passez mon interview, j’aimerais que vous la titriez  :  »S’il te plait confine-moi un mouton »  ! Je suis confiné chez moi, à Port en Bessin en Basse Normandie, non loin du fameux décollage où je passe souvent en faisant mon footing. Je continue à donner des cours en télé-travail, je lis, j’écris, je râle.

Tu râles  ? Pourquoi  ?
Je comprends parfaitement la complexité des problèmes à gérer mais je trouve absurde d’imposer à un pays si divers, où la situation épidémique est si variée, la même règle de concentration partout alors qu’il faudrait au contraire se disséminer le plus possible. Et toujours avec ces caractéristiques technocratiques si françaises  : un seul homme décide, on interdit tout et on fait de la répression policière. Il y en a marre d’être infantilisé  ! Surtout par des gens qui n’ont pas les moyens de nous protéger. Je ne le leur reproche pas, mais quand on ne sait pas, on n’est pas aussi prétentieux, tout en faisant des protestations d’humilité à chaque discours. Pascal disait  : «  Les discours d’humilité sont matière d’orgueil aux gens glorieux  ». Le pire, c’est qu’on retrouve ce caporalisme à tous les niveaux, l’épidémie réveille le tyran qui sommeille en chacun de nous. La FFVL a  »déconseillé » de voler… un gars de mon club a aussitôt traduit dans un mail circulaire  :  »La FFVL ‘interdit’ le vol »  ! Dans un cas on me traite en responsable, dans l’autre en enfant. On devrait faire plus confiance aux citoyens en les laissant s’organiser entre eux, à leur échelle  : ils ont compris les données du problème, la distance à respecter, l’hygiène des mains, tout ça. On devrait aussi plus tenir compte des particularités régionales. En quoi courir le long de la mer sur des plages désertes est-il gênant  ? Au contraire, plus on s’écarte les uns des autres, plus c’est sain. En montagne, on empêche les gens d’aller se balader, soi-disant parce qu’il y a un risque, et même là où il n’y a aucun encombrement aux urgences. Et en plus on envoie des hélicos pour les aligner  !  Depuis un mois, je joue aux gendarmes et aux voleurs (NB que je n’ai pas pris une prune).

Tu as écrit un livre sur les épidémies, tu as donc sûrement un regard plus pertinent que le nôtre  ?

Non, je suis comme toi  : je ne sais pas comment va évoluer le virus. Mais ça ne te surprendra pas, je m’étonne qu’on fasse si peu de cas de la météo dans toutes les spéculations qu’on entend sur le devenir de l’épidémie. Les grippes disparaissent au printemps chaque année, d’autres maladies à coronavirus aussi, comme le SRAS il y a vingt ans. Je ne dis pas que c’est ce qui va se passer mais on peut quand même avoir cette lueur d’optimisme dans la tête en l’absence de vaccin et de traitement, au lieu de ressasser la fatalité d’une deuxième vague épidémique cet été, forcément plus grave que la première. À quoi bon désespérer tout un pays quand on ne sait rien  ! C’est tout le problème de ce bavardage en continu, catalysé par les télés, les radios, les réseaux. Bonne raison pour se taire…